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Crise de l’eau à Mayotte : une enquête pénale pour cerner les responsabilités

La saison des pluies, généreuse en décembre et en janvier, a réalisé son œuvre tant attendue à Mayotte. Les deux principaux réservoirs d’eau de Combani et Dzoumogné sont à nouveau quasiment remplis. « Une amélioration de la ressource », se félicite la préfecture qui autorise, depuis le 19 février, un allègement des restrictions de la distribution d’eau au robinet passant d’un jour sur trois au lieu de deux sur trois.
Dans le « mille-feuille » des crises mahoraises, selon une expression locale, les cinq semaines de barrages dans l’île, les revendications des collectifs de citoyens sur l’état d’urgence sécuritaire, et la volonté du gouvernement de supprimer le droit du sol dans le 101e département français ont éclipsé cette sécheresse majeure nécessitant l’acheminement, depuis septembre 2023, de plus de 35 millions de litres d’eau avec 26 rotations de bateaux partis de la métropole ou de La Réunion, selon les chiffres obtenus par Le Monde.
Cette pénurie a fait réémerger de façon aiguë les graves dysfonctionnements touchant à la fois la distribution et la qualité de l’eau potable. Et mis en exergue les responsabilités de l’Etat, des collectivités mahoraises, du Syndicat intercommunal d’eau et d’assainissement de Mayotte (Sieam) et de la Société mahoraise des eaux (SMAE), filiale du groupe Vinci, titulaire depuis janvier 2008 du marché public de l’eau.
Un « scandale sanitaire qui doit cesser », s’indigne Me Emmanuel Daoud, avocat d’une trentaine d’abonnés, qui ont déposé plainte dans les derniers jours de décembre avec la conviction que des infractions ont été commises. Depuis, une enquête préliminaire a été ouverte et confiée à la direction territoriale de la police nationale de Mayotte, confirme le procureur de Mamoudzou, Yann Le Bris.
Cette plainte vise les délits « d’exposition d’autrui à un risque immédiat de mort ou de blessure de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente »  ; de non-respect du code de la santé publique imposant que toute personne bénéficie quotidiennement d’une « quantité d’eau destinée à la consommation humaine suffisante pour répondre à ses besoins en boisson, en préparation et cuisson des aliments, en hygiène corporelle, en hygiène générale ainsi que pour assurer la propreté de son domicile et son lieu de vie »  ; ainsi que le délit de « soumettre autrui à des conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine ».
Après des actions avortées en référé devant le tribunal administratif de Mayotte, saisir la voie pénale est « réaliste et symbolique », estime Me Daoud. « Nous voulons chercher derrière le voile des personnes morales ceux et celles qui sont les décideurs et qui n’ont pas fait leur travail avec des conséquences graves sur la vie au quotidien des plaignants et sur leur santé », ajoute l’avocat.
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